Argument



Notre manière de penser et de vivre la sexualité aujourd’hui dépend en grande partie de notre héritage historique récent. Deux traits majeurs s’en dégagent, étroitement liés : les conséquences de la « libération sexuelle » d’une part ; celles de la disjonction de la sexualité/reproduction d’autre part. A l’image de cet héritage complexe, nos attitudes à son égard le sont également.  Tantôt nous le revendiquons, cherchant à comprendre les nouveautés auxquelles il nous confronte ; tantôt nous le redoutons, craignant la disparition des limites nécessaires à notre humanisation ; tantôt enfin nous le soupçonnons de dissimuler des formes de répression, encore plus subtiles que les anciennes.

Comment, à partir de leur domaine de légitimité, les sciences humaines nous aident-elles à nous situer vis-à-vis de cet héritage ? Comment nous permettent-elles de comprendre en quoi le sexuel et la sexualité travaillent en permanence le sujet et la culture ?

Pour le sujet, la sexualité est inséparable de ses interrogations à propos de, son origine, son corps, son plaisir et sa rencontre avec autrui. A travers elle et le travail psychique qu’elle impose, le sujet se confronte de manière privilégiée aux interdits et aux normes de la société dont il fait partie. Dans le contexte social et normatif actuel,  qu’en est-il de ce travail subjectif ? Une telle question convoque bien sûr la psychanalyse mais concerne aussi la psychiatrie, dans les domaines les plus variés : la clinique de l’adolescence, les nouveaux modes de procréation, les formes renouvelées de famille, le vieillissement, les agressions sexuelles.

Pour la société, l’encadrement de la sexualité reste un impératif : à quels principes obéit aujourd’hui cet encadrement ? Une approche centrée sur la subjectivité trouve ici sa limite et se doit, dans un tel domaine, d’engager le dialogue avec d’autres disciplines : la sociologie, l’anthropologie, le droit, l’histoire, la philosophie.